Le blogue du Québec maritime
- Stéphanie Giacomotto
Observation des blanchons : le récit d’une aventure unique
L’observation des blanchons sur la banquise entourant les Îles de la Madeleine est une expérience hors du commun et riche en émotions. Sous un ciel bleu limpide et devant tout ce blanc à perte de vue, on se sent vraiment petit. Puis vient la rencontre de ce mammifère marin : le blanchon, une petite boule de poil d’un blanc immaculé qui nous regarde intensément avec ses petits yeux noirs. Stéphanie Giacomotto, de Nord Espaces, a récemment vécu l’expérience offerte par le Château Madelinot. Nous lui avons demandé de nous en parler.
Le Québec maritime (LQM) : À quel moment a eu lieu votre excursion d’observation des blanchons?
Stéphanie Giacomotto (S.G.) : L’excursion pour l’observation des blanchons a eu lieu au mois de février 2015, donc en plein hiver; le froid du nord, mais aussi le ciel bleu de l’hiver canadien étaient au rendez-vous.
(LQM) : Était-ce la première fois que vous vous approchiez d’un mammifère marin?
(S.G.) : Oui, toute première fois qu’il y avait ce contact direct, intense; j’ai pu approcher d’autres mammifères marins, par exemple des baleines ou des dauphins en faisant de la plongée. Mais au-delà même du fait que l’être humain en plongée est dans un environnement où la sécurité doit primer, les baleines, les dauphins ne permettent pas ce contact qui émotionnellement parlant est unique. Là, on ressent véritablement un contact privilégié et on n’est pas simplement spectateur comme derrière un masque de plongée. C’est pour cela que je dis que c’est bien la première fois que j’approche ainsi, vraiment, un mammifère marin.
(LQM) : Comment vous êtes-vous rendue sur place? Le trajet a-t-il été long? L’observation des blanchons était-elle la seule activité proposée?
(S.G.) : Au départ de Québec, le trajet s’est fait en avion. Il dure environ 3 heures et passe assez vite, car, entre l’excitation de l’expérience que j’allais vivre et les sublimes paysages vus du ciel, pas le temps de s’ennuyer. Le séjour aux Îles est prévu sur 4 jours. L’observation des blanchons y est bien sûr l’activité principale et dure une demi-journée.
Le reste du séjour est consacré à la découverte de petits coins de paradis perdus, connus seulement des insulaires… des secteurs de l’ouest et du centre des îles reliés entre elles par d’étroites dunes de sable. Visite du centre d’interprétation du phoque, dégustation de bières de À l’abri de la Tempête, promenade sur la plage de la Grande Échouerie (classée parmi les plus belles du monde par le prestigieux magazine National Geographic), admiration des étoiles depuis la banquise, raquette ou ski de forêt, photographie du coucher du soleil à Belle-anse…
De retour en France, j’ai conçu un programme que j’ai appelé « L’éveil des blanchons ». Ce n’est pas un hasard ! J’ai souhaité que les voyageurs s’éveillent eux-mêmes face à la beauté de la nature au Canada et puissent vivre ce que j’ai vécu : une expérience intense, riche, diversifiée qui combine culture, nature, émotions, beauté et même silence.
(LQM) : Dans quel état d’esprit vous sentiez-vous avant de les voir?
(S.G.) : Comme tout voyageur qui veut approcher ces mammifères et qui sait que cela constitue le point majeur du voyage, j’avais conscience de vivre un moment hors normes, d’être privilégiée d’avoir cette possibilité de connaître ce que peu de gens connaîtront dans leur vie. Il faut se réveiller tôt? Qu’importe! Tout le groupe était prêt à l’heure et nous avions tous cela en commun : cette pointe au creux de l’estomac qui fait plaisir parce qu’on sait qu’on va approcher quelque chose d’unique, de beau et qu’on sait aussi qu’on en reviendra avec des images extraordinaires.
(LQM) : Combien de temps êtes-vous restée sur place à observer les blanchons?
(S.G.) : Quelques secondes… Non quelques semaines… En fait deux heures extraordinaires qui me semblent avoir passé à la fois très vite, mais qui apparaissent très riches parce qu’elles étaient intenses. À aucun moment il n’y a eu le sentiment qu’il faisait froid, qu’il fallait rentrer… La beauté des lieux, le fait de se dire que nous étions au milieu de l’Océan, sur la banquise, dans un lieu plus beau encore qu’un décor de cinéma fait que le temps semblait s’être arrêté. Quand il a fallu repartir, j’ai regardé ma montre : déjà 2 heures? Seulement 2 heures…
(LQM) : Combien pensez-vous avoir vu de blanchons ce jour-là?
(S.G.) : Je dirais qu’il y a deux moments : l’arrivée et sur place. Avant d’atterrir, tout le monde essaie de voir le sol et c’est un spectacle incroyable que de distinguer des milliers de blanchons. Je n’exagère pas et, en tous cas, c’est le sentiment que nous avions : il y en avait tellement! Une fois à terre, cela s’est confirmé puisque personnellement j’estime avoir vu une centaine de blanchons et donc je n’ai eu que l’embarras du choix pour choisir ceux dont j’allais m’approcher et que j’allais regarder, droit dans les yeux.
(LQM) : Avez-vous pu les photographier ou les filmer?
(S.G.) : Sans aucun problème! J’ai pu photographier, filmer, être photographiée… en gros plan avec un blanchon, de plus loin, sur la banquise. L’impression de sérénité qui se dégage de ce lieu fait qu’il n’y a pas crainte ou de mouvements brusques. On s’approche, on photographie, on est photographié, tout naturellement…
(LQM) : Pouvez-vous nous décrire l’ambiance? Ce que vous avez ressenti?
(S.G.) : Une fois descendus sur la banquise, on progresse doucement et silencieusement, un bâton à la main pour éviter de glisser. On est sur la banquise, loin de tout, loin du bruit de la ville, loin du stress. Le blanc est partout. On est hors du temps. Chacun est libre de se déplacer, d’aller et venir à sa guise – sous l’œil expert du guide quand même, mais là plus que jamais avec ce sentiment de vivre l’exceptionnel. Tous, nous savions que nous étions un petit groupe de privilégiés et finalement cela nous rendait respectueux. L’excitation d’avant le départ a fait place à un sentiment d’exaltation qu’il est très difficile de décrire parce qu’il est très personnel : est-ce ce sentiment de liberté, de bout du monde, ce ressenti du silence troublé juste par les premiers cris des blanchons appelant leurs mères? Toujours est-il que nous ressentions vraiment le fait d’être dans un « ailleurs total » avec la volonté de tout voir, de ne pas lâcher une seule seconde, de ne rien perdre, mais en étant sereins, apaisés, zen… Un peu comme dans un rêve très agréable en sachant qu’il faudra quand même se réveiller; nous nous sommes pris mutuellement en photo et, finalement, je dirais que ces sentiments très personnels n’ont pas empêché de créer dans le groupe des liens forts.
(LQM) : Si vous deviez résumer en une phrase cette expérience, que diriez-vous?
(S.G.) : Un moment intense, hors du temps, qui vous marque à jamais par sa beauté simple et qu’il faut vivre respectueusement, en sachant qu’on est privilégiés d’avoir la chance de vivre une telle expérience.
(LQM) : Quels conseils donneriez-vous aux touristes qui souhaitent observer les blanchons?
(S.G.) : C’est un voyage qui touche au plus profond le voyageur : il faut mentalement être prêt à vivre l’extraordinaire. Si c’est juste pour voir, c’est dommage. Échangez bien avec votre voyagiste pour être certain que ce voyage vous correspond. Le temps, le nombre de blanchons, l’environnement, font qu’il n’y a pas deux fois le même voyage : il faut donc savoir savourer chaque seconde de cette expérience intense et donc s’y préparer. Soyez respectueux pour que ces instants d’émotions puissent être vécus par la suite par d’autres qui pourront, à leur tour, approcher les blanchons. Choisissez bien votre voyagiste pour qu’il ne vous vende pas cette expérience comme quelque chose de banal.
(LQM) : Est-ce une expérience que vous seriez prête à revivre?
(S.G.) : On part quand? :-)
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